Eau potable en Guyane : la situation est « revenue à la normale », assure l’ARS
L’information a circulé comme une traînée de poudre avant de susciter de vives réactions dans le débat public. La semaine dernière, le député Jean-Victor Castor (GDR) a interpellé le gouvernement sur la qualité de l’eau potable en Guyane, accusant l’État et les autorités sanitaires d’inaction face à des pollutions répétées. « Trialométhane, aluminium, mercure... voilà la liste des poisons que les Guyanais ingèrent quotidiennement ! » a lancé le député à la ministre de la Santé, dans l’hémicycle du Palais Bourbon.
Le parlementaire a dénoncé « un facteur de risque permanent pour la santé publique » et reproché à l’Agence régionale de santé (ARS) son « silence » face à la situation. Il a exigé « un plan d’action à court et moyen terme pour garantir le droit à une eau potable et sans danger ».
Des dépassements réels mais circonscrits
Ces inquiétudes trouvent leur origine dans une série d’enquêtes publiées dès mars 2025 par France-Guyane, révélant des taux anormaux d’aluminium à Saint-Georges de l’Oyapock et des dépassements de trihalométhanes (THM) dans plusieurs communes du littoral, notamment au sein de la Communauté d’agglomération du Centre Littoral (CACL) et à Sinnamary.
Les analyses avaient mis en évidence des concentrations pouvant atteindre 134 microgrammes par litre (µg/L), alors que la norme maximale autorisée est de 100 µg/L. Ces composés, produits lors de la chloration de l’eau, peuvent à long terme augmenter le risque de cancers de la vessie.
« Cet épisode met en lumière les limites structurelles de notre système de production et de distribution de l’eau potable », a déploré le sénateur Georges Patient dans un communiqué.
Face aux révélations, un plan d’action renforcé a été lancé par la CACL, en lien étroit avec l’ARS et la Société Guyanaise des Eaux (SGDE). Celui-ci repose sur plusieurs mesures :
- réduction du dosage en chlore à la sortie des usines, tout en maintenant une désinfection efficace ;
- remise en service des unités de traitement UV, limitant la formation de THM ;
- purges régulières dans les zones sensibles pour éviter la stagnation de l’eau ;
- rechloration intermédiaire pour garantir la qualité sanitaire sur l’ensemble du réseau.

© Station La Comté SGDE
L’ARS se veut rassurante : « L’eau est potable »
Après plusieurs mois de suivi, l’Agence régionale de santé affirme que la situation est désormais maîtrisée. « Les améliorations ont permis de faire descendre les seuils. Seul un point de prélèvement se trouve encore au-dessus de la norme », indique Laurent Bien, directeur général de l’ARS Guyane. Selon les données transmises par l’agence, les concentrations moyennes de THM sont passées :
- de 134 µg/L à 88 µg/L pour les communes alimentées par la station de La Comté,
- de 115 µg/L à 54 µg/L pour la station de Matiti,
- et à 79 µg/L en moyenne à Sinnamary.
« L’eau en Guyane est potable. Nous avons réalisé plus de 250 prélèvements sur le territoire, en lien avec les collectivités et l’opérateur. Les actions engagées ont permis d’obtenir depuis septembre une quasi-totalité de résultats en dessous du seuil réglementaire », précise Laurent Bien. L’ARS assure que la santé des usagers n’a jamais été mise en danger, tout en appelant à la vigilance.
« Il y a eu des dépassements de seuil en début d’année, mais la situation est aujourd’hui stabilisée. Nous devons maintenant veiller à ce que ces résultats se maintiennent dans le temps »
Du côté de la SGDE, on confirme également le retour à la normale. « Les opérations menées ont produit les effets attendus. Nous restons mobilisés pour garantir une eau de qualité et transparente pour tous les Guyanais », affirme la société des eaux dans un communiqué
La question de la transparence de l’information et de la modernisation du réseau d’eau reste au cœur du débat. L’ARS indique poursuivre la surveillance et de publier régulièrement les résultats des analyses sur son site et auprès des communes concernées. « L’eau du robinet en Guyane est aujourd’hui potable. Mais la vigilance doit être permanente », conclut Laurent Bien.